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Un jour que je déjeunais avec Pihen et que nous discutions des difficultés de la vie, il s’effondra en larmes :

Tu sais, le malade est soutenu par toute une équipe médicale mais il n’y a rien pour soutenir l’aidant. Il vit au jour le jour les difficultés du malade tout en gérant le quotidien car la vie poursuit son chemin, quoi qu’il arrive. 

Ce petit manuel de survie pour « aidant » lui est dédié, avec toute la reconnaissance éternelle que je lui voue pour ce parler vrai, si rare mais tellement enrichissant. Merci Pihen.

PETIT LEXIQUE

Ce qui est le plus difficile à vivre pour un aidant, ce n’est pas tant la fatigue physique mais l’angoisse et la peine de voir souffrir ceux qu’on aime.

L’aidant  est une personne heureuse*,

un soutien sans faille à celui qui est au combat, le seul combat autorisé sur Terre : celui avec soi-même. Ce marathonien pluridisciplinaire travaille quotidiennement ce que l’on ne nous apprend pas : l’efficience* invisible*.

Être heureux  c’est donner sans rien attendre en retour.

Laisser agir le temps, observer le résultat, puis laisser s’afficher sur nos lèvres ce sourire intérieur qui surgit du plus profond de soi lorsque cela va mieux. Savourer cet instant puis fermer les yeux et respirer profondément pour ancrer ce souvenir. Souvenir qui sera des plus utiles dans les moments difficiles.

L'efficience  c'est apporter des solutions optimales aux problèmes.

Solutions qui répondent aux questions qui accompagnent l'action : Quoi faire, Quand le faire, Comment le faire, Combien de temps, d’efforts et de ressources pour le faire, tout en suivant le fil conducteur du Pourquoi le faire. Le Pourquoi se doit d'être omniprésent à l'esprit. Il donne du sens à l'action et de fait, maintient la motivation.

Invisible  "C'est l'histoire d'un grillon qui ne se trouvait aucun mérite et se sentait futile au point d’envier le papillon qui était sans cesse admiré pour son vol gracieux et ses couleurs chatoyantes. Jusqu’au jour où il vit un groupe d’enfants courir après le papillon ; ils l’attrapèrent et le firent périr. Oh ! oh ! dit le grillon, je ne suis plus fâché ; il en coûte trop cher pour briller en ce monde ; combien je vais aimer ma retraite profonde."  Fable du XVIIIe siècle

Être « au côté de »  veut dire devenir l’ombre de.

Une ombre discrète mais active que personne ne soupçonne. Une ombre qui tient sur la durée. Une ombre qui crée la surprise.

Ce marathonien pluridisciplinaire  a donc pour mission de :

Faire ce qu’il faut, au moment opportun, de la bonne façon, dans un temps adéquat avec un minimum d’effort et de moyens, et ce quel que soit le domaine d’intervention.                                                                              YES WE CAN - JUST DO IT -

TIPS de SURVIE pour MARATHONIEN PLURIDISCIPLINAIRE

Tu es en santé

Pourquoi te plaindre ? C’est incompréhensible, un non-sens ... uniquement pour tous ceux qui n’ont jamais été à ta place. Toutefois, aller chercher de l'aide quand tu te sens perdu, est tout à ton honneur.

Ton rôle est de soutenir

Le moral est essentiel à la guérison : le sien et le tien. Se rappeler pourquoi tu le fais provoque un regain d'énergie.

Ce que tu ressens est perceptible

et donc reçu par l’autre; le positif mais aussi ce qui l'est moins. Maîtriser ses pensées est difficile mais essentiel.

L'énergie que tu déploies est communicative,

ton sourire aussi. Use-en en abondance.

Nul n’est censé tout savoir

Poser des questions est le moyen le plus efficace d’apprendre. Être informé permet d’agir en conscience. Il n'y a de questions idiotes que pour l'idiot qui croit tout savoir.

Fais ce qui te semble bon de faire,

sans vouloir en faire trop. Le trop est réellement l’ennemi du bien. Dans ton cas il conduit à l’épuisement, ce qui est tout sauf ce que l’on attend de toi.

Ne rien attendre de la personne que tu soutiens,

est la meilleure façon d’avoir de très belles surprises. Les attentes mènent souvent à la frustration.

Couver l’autre l’infantilise,
Il est déjà suffisamment affaibli pour ne pas en rajouter.

Être présent,

sans être vu, pour surgir uniquement au moment où de toute évidence il ne peut pas s’en sortir seul. C'est seulement après quelques tentatives infructueuses que le besoin d’aide devient conscient et de fait, que l'aide est appréciée. Puis retourner dans l’ombre, tout en dégageant ce ressenti sécurisant de présence, sans nécessairement être à proximité.

Ne pas te sentir blessé

Si intervenir trop tôt contribue à l’infantilisation néfaste, c’est aussi courir le risque de se prendre une volée de bois verts, fruit d’une frustration justifiée mais pas nécessairement agréable. Ne sois pas blessé si toutefois la volée de bois verts te tombe dessus. Ce n’est pas toi qu’il agresse, c’est à lui seul qu’il en veut. Être affaibli, ne plus avoir la force de faire la moindre petite tâche usuelle est très difficile à accepter. Sois patient, quand ce cap de l’acceptation est franchi, l’aide est accueillie de bon cœur. La connivence qui en résulte fait que tu te sens utile et gratifié.

Attention au sentiment d'impuissance
Néanmoins, intervenir trop tard n’est guère plus souhaitable car c’est la porte ouverte au sentiment d’impuissance. L’impuissance qui s’installe peut conduire au renoncement, à l’abandon. On aurait alors tous perdu.

Te ressourcer
Te rassurer en regardant l’autre profondément endormi et en te disant que le sommeil est le seul moyen dont dispose le corps pour se régénérer et combattre la maladie. Accueille ces moments avec quiétude car ils te permettent de te ressourcer.

L'espoir occupe la place
Savourer le moment de son réveil tel une renaissance. Le passé n’est plus. L’espoir occupe l’espace.

Être curieux
Laisser les portes ouvertes, s’intéresser aux personnes que l’on rencontre, les écouter est enrichissant et source d'idées. On apprend chaque jour.

CONCLUSION

Le statut d’aidant te met en position d’hyper sensibilité : Tu vois davantage, tu entends davantage, tu captes davantage tous les « bruits » qui te ramènent à la maladie.

Soutenir c'est réveiller l'humanité en nous, ce pouvoir extraordinaire de l'amour inconditionnel. La présence invisible est un art. Un art qui, travaillé au quotidien, est fantastiquement gratifiant. Le temps est notre allié. Il nous permet de réapprendre à écouter nos ressentis. Même si l’on n’est pas à proximité, l’appel de l’autre est un ressenti qui ne laisse aucun doute.

La plus grande satisfaction de ce marathonien est de franchir la ligne d'arrivée ensemble.

Avoir confiance en la vie est la meilleure façon de la vivre.

Personne ne sait de quoi demain sera fait.